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ISSN 2753-4812
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Conseils pour Palseng

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Conseils pour Palseng

par Dodrupchen Jigmé Tenpé Nyima

Je m’incline avec respect devant le maître, Drimé Özer,
Et, les mains jointes, je lui rends hommage.
Je vais ici expliquer l’équivalent d’une gouttelette
Puisée dans les instructions du maître omniscient.

Au sujet de ce qu’on appelle « esprit » (sems) et « pure présence éveillée » (rig pa), certains textes généraux disent que tout ce qui est « l’esprit principal » est esprit, alors que la cognition est ce qui est « clair et connaissant ». Ils affirment donc qu’esprit est synonyme de conscience (rnam shes), alors que présence éveillée est synonyme de cognition (shes pa). De telles explications s’avèrent pourtant insuffisantes quand il s’agit d’identifier l’esprit et la présence éveillée tels qu’on les entend dans les textes du Dzogchen.

Dans le Dzogchen, l’esprit est la racine de l’existence samsarique, et il inclut une tendance à se cramponner aux choses comme si elles étaient réelles ; par contraste, la pure présence éveillée, c’est la sagesse selon laquelle on se pose de façon équanime et conforme à la réalité intrinsèque (dharmatā). Ce n’est pas comme la vue ordinaire de la Voie médiane. L’approche est supérieure parce qu’elle suscite une certitude d’un genre bien spécial, grâce au raisonnement qui prouve que le véritable mode d’être des choses, tel qu’il est perçu par les bouddhas, est présent en tant que base parfaite de la nature fondamentale des êtres ordinaires. À un niveau ultime, tant l’existence véritable que l’absence d’existence véritable sont considérées comme égales, et toutes les positions théoriques sont dépassées à la lumière du raisonnement ultime. Au niveau conventionnel, cette approche est également supérieure, parce qu’elle incorpore la pratique consistant à voir l’infinie pureté de tous les phénomènes.

L’approche du Dzogchen est aussi supérieure aux véhicules des mantras externes, puisqu’elle intègre le profond point clé consistant à voir les phénomènes comme [un déploiement de] sagesse et de formes éveillées, puis à se déposer sans artifice dans la grande condition naturelle. Elle est aussi supérieure au véhicule des perfections transcendantes parce qu’elle implique de considérer les phénomènes comme étant infiniment purs. Elle est encore supérieure aux véhicules des mantras externes parce que, bien que ces tantras présentent le yoga de la déité, ils n’offrent pas la vue qui reconnaît que, dans leur condition naturelle, ces apparences n’ont toujours été que sagesse et formes éveillées. Le Dzogchen est plus profond que le Mahāyoga et l’Anuyoga, parce qu’il ne requiert nul entraînement aux étapes de génération et d’achèvement, qui impliquent des efforts. Plutôt, puisqu’on reconnaît dans tous les phénomènes l’éveil primordial et l’éclat de la pure et grande sagesse, il suffit de demeurer dans cette reconnaissance et de se détendre dans la nature de la base.

Cela diffère de l’approche adoptée par certains méditants contemporains, qui se contentent de se déposer dans les perceptions illusoires sans trancher la racine de l’attachement à la réalité, et sans réaliser la nature de l’infinie pureté.

Pour plus de détails sur le fait qu’en essence, le [niveau] conventionnel n’est que sagesse et formes éveillées, et sur le fait qu’ultimement, pur et impur sont similaires en ce qu’ils sont dépourvus de nature véritable, on peut consulter les œuvres de l’omniscient Rongzom et du vainqueur Longchenpa. On y trouvera aussi des preuves de l’infinie pureté des apparences, et ainsi de suite.

Pour finir, je me demande si alterner entre méditation et analyse (tant qu’on n’a pas la certitude à l’égard de ces points) et se reposer (une fois que la certitude a vu le jour et qu’elle ne décline pas) ne constituerait pas un moyen authentique de préserver cette compréhension.

Dans ce que je viens d’écrire,
Toute analyse bête ou erronée,
Et tout propos insensé ou triplement invalide[1],
Ne sont attribuables qu’à moi, qui suis un benêt.
Néanmoins, s’il s’y trouve quelque chose de valeur,
Fais-en ta propre parure.

Le jeune Jigmé a écrit ceci pour répondre à la requête de Palseng. Que ce soit vertueux!


| Traduit en français par Vincent Thibault (2024) sur la base de la traduction anglaise d’Adam Pearcey (2015).


Bibliographie

Éditions tibétaines

’jigs med bstan pa’i nyi ma. dpal seng gi ngor gdams pa in rDo grub chen ’jigs med bstan pa’i nyi ma’i gsung ’bum. 7 vols. Chengdu: Si khron mi rigs dpe skrun khang, 2003. TBRC: W25007, vol. 2, pp. 53–55

______. dpal seng gi ngor gdams pa in rDo grub chen ’jigs med bstan pa’i nyi ma’i gsung ’bum. 5 vols. Gangtok, Sikkim, 2000? TBRC: W23907, vol. 1, pp. 496–498

Sources secondaires

Krang dbyi sun (Zhang Yisun), ed. Bod rgya tshig mdzod chen mo. 3 vols. Beijing: Mi rigs dpe skrun khang, 1985.

Tulku Thondup, Masters of Meditation and Miracles: The Longchen Nyingthig Lineage of Tibetan Buddhism. Boston: Shambhala, 1996.


Version : 1.0-20240717


  1. dpyad gsum ma dag pa, invalide à trois niveaux : 1) au niveau apparent, puisque cela entre en contradiction avec ce qu’on peut percevoir directement ; 2) au niveau caché, puisque cela contredit ce qu’on peut déduire correctement ; 3) au niveau extrêmement caché, puisqu’il y a des incohérences dans le texte lui-même. Voir « dpyad pa gsum gyis dag pa'i lung » dans Bod rgya tshig mdzod chen mo, vol. 2, pp. 1643–1644.  ↩

Dodrupchen Jigme Tenpe Nyima

Le troisième Dodrupchen

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