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ISSN 2753-4812
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Courte présentation de la Vue, de la Méditation et de l'Action

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Courte présentation de la Vue, de la Méditation et de l'Action

par Yangthang Rinpoché

Hommage

Protecteur primordial, toi qui demeures pour toujours au sein de l'unique sphère de la réalité qui embrasse tout,
Seigneur omniprésent dans toutes les familles de bouddha, Lama Vajradhāra,
Avec une confiance totale et une dévotion fervente centrées en un seul point, je te prie :
Accorde-moi tes bénédictions, afin que la transmission de l'esprit de sagesse puisse entrer dans mon cœur !

Préliminaires

Maintenant que tu as obtenu ce support d'une existence humaine, si difficile à trouver,
Que tu as fait s’élever cet esprit de renoncement, si difficile à développer,
Que tu as rencontré un maître authentique, si rare à croiser,
Et pris comme chemin le Dharma sacré, si rarement découvert,
Réfléchis encore et encore, à la difficulté de trouver
Un tel support physique, qui fournit toutes les conditions propices à la pratique.
Si tu ne profites pas pleinement de ce potentiel humain que tu possèdes à présent,
Qui est aussi impermanent qu'une flamme dans le vent,
Ne pense pas pouvoir en bénéficier pour toujours.
Au moment de la mort et dans les bardos, si tu manques de confiance dans la libération,
Comme elles seront effrayantes, les souffrances de ta prochaine existence !
Alors que nous errons sans fin dans le saṃsāra,
Quel désarroi de contempler sa nature !
Quoique tu puisses faire en cette vie pour acquérir une réelle confiance,
Personnellement, je t’en serai infiniment reconnaissant !
C'est mon espérance pour toi.

La Vue

Si tu souhaites regarder dans le miroir de la nature de l'esprit,
Ne regarde pas vers l'extérieur, mais tourne-toi vers l'intérieur.
Regarder vers l'extérieur amène l'illusion perpétuelle.
Mais regarde vers l'intérieur et tu verras ton propre esprit.
Ne suis pas les pensées passées,
N'anticipe pas les pensées à venir,
Quant aux pensées présentes et à l'agitation,
Dès que tu tournes ton esprit vers l'intérieur,
Ne fais aucun effort pour l'ajuster ou le modifier,
Mais laisse-le, simplement tel qu'il est, totalement libre, dans son propre espace de repos naturel.
Laisser ainsi les pensées dans leur espace de repos naturel
N'est pas la pratique principale, mais simplement un moyen de déposer l'esprit.
Pourtant, dans cette expérience même de déposer ainsi l'esprit
Tu es sur le point de rencontrer le rigpa de la pratique principale.
Dès que tu laisses l'esprit dans son état naturel,
Les pensées vont cesser naturellement et disparaître.
Ce qui reste, une fois dissipé le rayonnement naturel des pensées,
Est l'essence de l'esprit, vide et nette.
Libre de fixation, de dimension ou de limite,
Ce qui s'élève est une expérience semblable au ciel.
Ceci est l'essence vide, le dharmakāya.
Dans cet état vide,
La nature de l'esprit est claire et lucide :
Libre de toute caractéristique que l’on pourrait désigner,
C'est la clarté naturelle de l'esprit, qui n'est ni contenue, ni limitée.
Naturellement connaissante, c'est le saṃbhogakāya.
À part ce rigpa connaissant et cependant vide,
Il n'y a personne d'autre qui regarde.
Ce qui est vu est le dharmakāya vide,
Et celui qui le voit est la sagesse connaissante,
On peut les nommer « vacuité » et « connaissance »,
Ou encore « espace omniprésent » et « sagesse ».
Mais ce ne sont pas deux choses différentes :
La nature de ce qui est vide est clarté,
Et l'essence de ce qui est clair est vide.
Clarté et vacuité sont donc une unité indivisible.
Puisqu'elles ne sont pas différentes, mais d’une seule saveur,
Il n'y a pas de dualité entre ce qui est vu et celui qui le voit,
C’est « voir » de manière non duelle.
C’est pourquoi on le nomme « rigpa qui se connaît lui-même ».
L'esprit lui-même se voit lui-même.
Dans l'expérience de la saveur unique de la clarté et de la vacuité,
Bon et mauvais ‒ saṃsāra et nirvāṇa‒ sont d'un goût égal.
Ainsi, « saṃsāra et nirvāṇa » ne sont pas différents.
C'est cela, la Grande Perfection, le Dzogpachenpo.
Cette Grande Perfection,
Lorsqu'elle est réalisée,
Amène une compassion impartiale
Et une perception pure illimitée,
Qui s'élèvent naturellement et sans effort dans l'esprit.
Ceci est la compassion omniprésente, le nirmāṇakāya.
Tel est, par conséquent, le rigpa des trois kāya.
Décide qu'il n'y a rien d'autre à part cela.
Tant que tu es incertain, tu seras éparpillé
Et ne réaliseras jamais la nature de l'esprit.
La décision doit être établie avec certitude.
Ceci est la Vue de la Grande Perfection.

La Méditation

De la vue, la méditation et l’action, la vue est la plus importante.
Il est crucial que tu réalises la vue sans erreur,
Car sans réaliser la vue, la méditation n'a pas de base.
Tu dois donc réaliser la vue directement, sans confusion.
Puis, quand tu prends ceci à cœur dans la pratique,
Demeurer dans l'expérience de la vue que tu as reconnue,
De plus en plus longtemps, grâce à la persévérance, telle est la méditation.
À part cela, il n'y a rien d'autre sur quoi méditer.
En outre, jusqu'à ce que tu aies parachevé la vue,
Ne compte pas ta pratique en années ou en mois,
Mais décide de dédier le reste de ta vie à la pratique du Dharma.
Telle est l'approche des pratiquants suprêmes.
Si dès le début, tu parles de simplicité, d'équanimité et ainsi de suite,
Mais restes complètement indolent au lieu de pratiquer en sessions,
En faisant tout ce qui te passe par l'esprit, que ce soit en mangeant, en t’asseyant, en te distrayant ou en te prélassant,
Au final, il y a un grand danger que ta simplicité s'avère futile,
Et quand le moment de la mort arrivera, tout cela aura été en vain.
Le bavardage dépourvu de sens et la vantardise sont inutiles,
Au lieu de cela, suis les traces des grands êtres
Et sois humble, un pratiquant authentique du Dharma, en paroles et en actes.
Le mieux serait d’aller dans les montagnes désertes,
Ou sinon, de rester à l’écart des lieux affairés.
Ayant divisé ton temps en sessions et en périodes entre les sessions,
Pratique la méditation formellement, et abandonne les neuf formes d'activités.
Sans être distrait extérieurement ni attaché intérieurement,
Dépose-toi en équilibre dans l’expérience de l’espace de repos naturel de l'esprit.
Peu importe ce qui apparaît aux cinq sens,
Laisse tout se refléter comme des étoiles ou des planètes à la surface d'un lac,
Et demeure en équilibre dans l'espace naturel, sans saisie
Et sans le moindre point de référence ‒ telle est la suprême méditation.
Bien que cela puisse être difficile au début,
Avec un entraînement graduel, cela se déploiera progressivement.
Dans l’après-méditation, entraîne-toi à la vacuité et la compassion,
En voyant les choses comme des illusions magiques ou comme des rêves.
Applique-toi autant que possible dans les pratiques du Dharma qui purifient les obscurcissements.
Il est particulièrement crucial de mêler la vue acquise pendant la méditation
À toute pensée qui s'élève, pour unir la méditation et l’espace entre les sessions.
Distingue entre la conscience base-de-tout et le dharmakāya, l’esprit et rigpa.
Reconnais les qualités et les défauts tels que les trois égarements : se tromper, s'égarer et avoir tort,
Et mets véritablement au cœur de ta pratique l’adoption des qualités et l’évitement des défauts.
Voilà ce qui est à faire dans l’espace entre les sessions.
Quand tu te seras longuement efforcé de pratiquer ainsi,
Toutes les expériences de félicité, de clarté et de vacuité se produiront.
Quoi qu’il s’élève, ne saisis pas le flot constant des perceptions,
Mais dissous-les avec la vue, et maintiens le flot de la pratique dans l’espace du repos naturel de l’esprit.
Graduellement, les expériences positives vont augmenter, et les mauvais signes disparaître.
Dans chaque session, commence par donner naissance à l'esprit d'éveil,
Et reçois les quatre transmissions de pouvoir du guru yoga.
À la fin, scelle la session avec des prières de dédicace et d'aspiration.
Puisque ces [trois] structurent la pratique de la méditation, ils sont indispensables.
En particulier, la pratique du Guru Yoga
Est l'ultime moyen pour arriver à l'état de non-méditation.
Alors, jusqu'à ce que ton propre rigpa s'élève directement comme le lama,
Puisque ceci est la forme principale de la pratique de méditation, chéris-la comme cruciale.
Si tu peux pratiquer de cette manière en quatre sessions tous les jours,
Constamment et sans hésitation,
Tu parachèveras les différentes étapes, telles que les cinq expériences que Vimalamitra a enseignées (1. mouvement, 2. réalisation, 3. familiarisation, 4. stabilité et 5. achèvement), et dans l’espace de repos primordial,
Tu t'empareras de la citadelle ‒ de ceci n'aies aucun doute !
Même si tu ne réussis pas à faire cela, et que tu pratiques ces instructions seulement avec un effort modéré,
En écoutant et en réfléchissant dans une certaine mesure aux enseignements,
L'attachement aux huit préoccupations mondaines diminuera,
Et tu passeras ta vie libre de tous soucis, content et à l'aise.
Dès ton premier pas sur le chemin, il ne te faudra pas beaucoup de temps pour te libérer dans l'omniscience primordiale ‒ c'est certain !

L’Action

Ensuite, pour aborder brièvement le sujet de « l'action » :
Lorsque tu demeures en méditation de cette façon
Et qu'une nouvelle pensée s'élève soudainement
Ou que le courant profond des pensées bouillonne,
Les pensées qui s'élèvent sont perçues depuis l'expérience de ton propre rigpa.
Ne les suis pas en les considérant bonnes ou mauvaises, plaisantes ou déplaisantes.
En fait, ne fais rien du tout. Mais, dès que tu vois le mouvement s'élever,
Au sein même de ce qui s'élève, laisse l'esprit trouver son propre espace de repos naturel.
En déposant l'esprit en lui-même, les pensées vont disparaître immédiatement
Et tu reviendras directement à rigpa.
Alors, comme précédemment, maintiens cette pratique de laisser l'esprit dans son propre espace de repos.
De cette façon, à chaque fois qu'une pensée s'élève, bonne ou mauvaise,
Ne t'y attache pas, mais permets-lui de se libérer au moment où elle s'élève.
Il y a trois façons par lesquelles les pensées sont libérées,
Mais il n'y a vraiment aucune différence entre elles ‒ elles s’élèvent par elles-mêmes, elles se libèrent par elles-mêmes.
Quand une pensée apparaît, elle vient de l'étendue du dharmakāya,
Et quand une pensée s’en va, elle cesse au sein de l'étendue de rigpa.
Ces mouvements sont sans danger si tu sais comment les laisser se libérer naturellement.
Telle est l'instruction spéciale pour renforcer la vue.
Si tu t'exerces ainsi, tu auras moins de pensées
Et quand elles s’élèveront, elles ne souilleront pas la base.
Les trois façons de libérer ‒ inférieure, moyenne et supérieure ‒ vont se dévoiler progressivement.
Mais sans ces points-clés de libération,
L'accomplissement final de la liberté ne se produira jamais.
Connaître le moyen de libérer les pensées est la suprême forme d'action.
Le fruit d'une telle pratique sera l’affaiblissement
Des émotions destructrices et des pensées,
L'attachement aux huit préoccupations mondaines va diminuer,
La dévotion et la perception pure vont constamment s'accroître,
Tu reconnaîtras les rêves, la claire lumière s'élèvera, et ainsi de suite :
Voilà les fruits authentiques du chemin.
Sinon, avoir des visions de déités, recevoir des prophéties,
Obtenir la clairvoyance et ainsi de suite pourraient bien ne pas être les fruits du chemin.
Que cela soit bon ou mauvais, on ne peut rien en dire. Cela pourrait être la tromperie de Māra.
Sans attendre, écarte-les immédiatement.
Finalement, au moment de la mort ou dans le bardo de la dharmatā,
Reconnais les apparences de la base, et dans cette base même,
Ayant saisi la citadelle, tu seras certain d'atteindre la libération !

J'ai écrit cette brève présentation sur la Vue, la Méditation et l’Action,
Simplement en réponse à la requête d'un ami, requête que je n'ai pu refuser ;
Une tentative plutôt hypocrite, faite par quelqu'un qui ne comprend rien de ce qui est décrit ici,
Et qui sans aucun doute engendrera de nombreuses erreurs.
Alors, assure-toi de demander à d'autres de clarifier tous tes doutes.
Si malgré tout, ce texte devait contenir un ou deux points de valeur,
J’en dédie les mérites afin que, grâce à eux, la pratique de mon ami devienne puissante,
Et qu'il puisse l'accomplir complètement,
Afin qu'il soit libéré dans l'étendue de la base primordiale.
En bref, je prie pour l'accomplissement du double but.

Moi, celui qui porte le nom de Yangthang Tulkou, j'ai écrit ce texte, plutôt incohérent et désorganisé, simplement pour éviter de décliner la requête répétée de Lama Tséwang, un ami du Dharma de Riwoché au Kham. Puisse ce texte être une cause de bienfait pour la pratique d'un ami !

| Rigpa Translations, 2013. Éditée pour Lotsawa House en 2016. Traduction française (sur la base de la traduction anglaise) par Moritz Régnier, revue par le Comité de traduction française Rigpa , 2017.

Yangthang Rinpoche

Domang Yangthang Rinpoche

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