Les strophes de vajra sur l’état naturel
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Les strophes de vajra sur l’état naturel
révélées par Rigdzin Jigmé Lingpa
Hommage au glorieux Samantabhadra !
L’état naturel de la base est libre de complexité,
Et les apparences de la base sont le rigpa-dharmakāya.
Le chemin a toujours été dénué d’effort, depuis le tout début.
Lorsque cette nature-même est rendue manifeste, elle est la grande source de liberté.
Le fruit n’est pas quelque chose de distinct et de séparé.
Quand le résultat lui-même est présent en tant que cause,
Se déposer complètement est le repos calme (shamatha).
Tout ce qui s'élève soudainement est le propre rayonnement de rigpa,
Et la conscience vive est la « vue claire » (vipashyanā).
Au moment-même de la dissolution de ce qui s’élève, l’expérience primordiale y est.
Demeurer authentiquement est le dharmakāya,
La conscience accompagnante est le sambhogakāya,
Et la non-dualité entre tranquillité et mouvement est le nirmāṇakāya.
C’est ce que nous appelons les « trois kāyas de rigpa ».
Tout en demeurant à l’aise, il n’y a pas d’attachement à l’expérience.
Les mouvements expressifs de l’esprit sont libérés, insaisissables.
Libérés dans la clarté vivante, il n’y a pas d’état d’esprit post-méditatif.
C’est ce que nous appelons les « trois kāyas spontanément présents ».
Sans la moindre vue délibérée, c’est au-delà de la torpeur et de l’agitation.
Sans méditation délibérée, l’on entre dans le ‘ventre’ originel.
Sans conduite délibérée, c’est libre de notions ou d’idées rigides.
Celui qui a maîtrisé ceci est un « seigneur parmi les yogis ».
Si vous êtes conscients d’une pensée au moment même où elle apparaît subitement,
Et que vous pouvez maintenir la continuité de la reconnaissance,
C’est typiquement la vue claire (vipaśyanā) qui s’est égarée.
Autrement dit, il s’agit de « l’après-méditation ».
Ce n’est donc pas la libération des pensées en dharmakāya,
Et nous devons trancher directement à la source.
Rigpa a toujours été libre d’élaboration conceptuelle.
Des conventions telles que ‘vue’, ‘méditation’ ou ‘conduite’, et
Toute saisie à leur égard, s’effacent, sans base ni origine.
Les bonnes pensées, les mauvaises pensées, et celles entre les deux,
Sans s’égarer dans de telles catégories,
Sont libérées au moment-même où elles s'élèvent, sans le moindre agent qui n’établisse de distinctions.
Tant que la présence éveillée ne perd pas sa propre base,
Il n’est besoin de rien de plus.
Même si vous rencontriez une centaine de moines érudits, un millier de siddhas,
Dix milles traducteurs et pandits, cent milles instructions,
Ou un milliard de traités, il n’y aurait toujours pas lieu de clarifier la moindre incertitude ou doute.
Samaya. Les signes s’estompent.
A mon unique fils, Khyentsé Özer, ceci fut donné par le Samantabhadra de la présence éveillée, sous forme de transmission de bénédictions et de réalisation. Ne le montre à personne, mais cache-le au fond de ton cœur.
C’est ainsi que, dans la grotte d’Akaniṣṭha, le vingt-sixième jour du mois des miracles, au moment où les ḍākinīs se rassemblaient pendant ma retraite dans l’obscurité, j’ai écrit ces lignes sur une page de papier précieux.
Cette transmission orale est scellée par atham.
Que ceci ! Que ceci !
Les contenus sont davantage développés dans Les paroles de l’Omniscient.
| Traduit du tibétain en anglais par Adam Pearcey, 2015, à la demande de Dza Kilung Rinpoché. Le traducteur est redevable à Sam van Schaik, dont l’excellente traduction de ce texte est parue dans Approaching the Great Perfection, Boston : Wisdom Publications, 2004, pp. 170–171. Toute différence significative d’interpretation provient de notre lecture du commentaire de Yukhok Chatralwa Chöying Rangdrol. Ce texte a été traduit de l’anglais en français par France Manghardt et Moritz Regnier, 2018.